Le parcours du mégot : petit déchet, grandes conséquences

Chaque jour, près de 11 milliards de mégots sont jetés au sol à travers le monde. Malgré les avancées importantes en matière de lutte contre le tabagisme, ce petit déchet reste omniprésent dans notre environnement.
Il constitue, depuis de nombreuses années maintenant, le premier déchet retrouvé lors de nos opérations de collecte sur les plages et dans les milieux aquatiques.

Depuis l’interdiction de fumer dans les lieux publics en 2008 et les nombreuses mesures de santé publique mises en place — paquet neutre, augmentation de la fiscalité, campagnes de prévention — la consommation de tabac en France a reculé.
Pour autant, ces dispositifs, dont l’impact sur la consommation de tabac a été très positif sur la santé publique, ont eu peu d’effet sur la présence des mégots dans l’espace public.

Jeter un mégot à terre demeure encore aujourd’hui un geste automatique pour de nombreuses personnes : qu’il soit jeté au sol lors d’une balade, sur la route lors d’un trajet en voiture, sur le trottoir à l’occasion d’une soirée en terrasse, dans un caniveau ou parfois même directement dans une bouche d’égout, ce réflexe persiste et contribue à la dispersion massive de ces déchets dans l’environnement et à la contamination tragique des écosystèmes aquatiques.

Un déchet mobile et insidieux

Le mégot est un déchet vicieux, qui ne reste jamais longtemps là où il a été jeté.
À la fois léger, petit et hautement mobile, il peut être très rapidement déplacé sous l’effet du vent ou des précipitations. Lorsqu’il est emporté par les eaux pluviales, il entre dans le réseau d’assainissement ou rejoint directement les cours d’eau, point de départ de son voyage vers l’Océan.

Le passage par les égouts

La plupart du temps après avoir été jeté au sol ou dans un caniveau, le mégot est entraîné vers les égouts.
A partir de ce moment, deux possibilités se présentent :

S’il est dirigé vers une station d’épuration, il peut, dans certains cas, être intercepté. Cependant, la petite taille du mégot le rend difficile à filtrer.
Mais surtout, le processus de pollution a déjà commencé : au contact de l’eau, les substances chimiques présentes dans le filtre commencent à se libérer, parmi lesquelles nicotine, métaux lourds ou encore microplastiques. Même si le déchet est capté, ses composants toxiques peuvent donc déjà avoir contaminé l’eau.
S’il “échappe” à la station, il poursuit sa route directement vers les milieux naturels, rejoignant ainsi les rivières, lacs, fleuves, puis l’Océan.

La dérive en milieu naturel

Lorsqu’il atteint un cours d’eau, et parce qu’il flotte parfaitement, le mégot entame une phase de dérive qui peut durer plusieurs jours, voire plusieurs semaines. Il est transporté au gré des courants, des crues et des marées. Contrairement à d’autres déchets visibles et massifs, il est rarement repéré, et donc rarement récupéré.
Pendant tout ce temps, il relargue progressivement les substances toxiques qu’il contient. 

Un polluant persistant

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, le filtre des cigarettes n’est pas composé d’éléments naturels biodégradables.

Ainsi, le mégot de cigarette ne disparait jamais vraiment. Il n’est en rien biodégradable.
Il est en réalité photodégradable : durant près d’une décennie, il se décompose sous l’effet des rayons UV du soleil en micro et nano-particules (notamment des microplastiques) qui persistent, quant à elles, dans l’environnement. Ces particules donc restent présentes dans l’eau ou les sédiments pour une durée indéterminée.

La toxicité de ce déchet en fait un vecteur discret mais redoutablement efficace de contamination des milieux aquatiques : en moyenne, un seul mégot peut polluer jusqu’à 1 000 litres d’eau.

La concentration de ces polluants est suffisante pour affecter les organismes aquatiques, notamment les invertébrés, les jeunes poissons ou les oiseaux marins : des études ont montré que dans un litre d’eau, il fallait moins de 96 heures à un mégot pour tuer la moitié des poissons exposés, d’autres ont révélé que ces substances sont présentes chez 70% des oiseaux marins.

Une responsabilité collective

L’urgence aujourd’hui n’est pas de pointer du doigt les fumeurs et fumeuses, mais de véritablement comprendre les conséquences invisibles d’un geste écocide devenu banal.

Pourtant de nombreuses options existent pour se débarrasser “proprement” de son mégot : les poubelles, idéales pour une élimination radicales (en prenant bien soin d’écraser le mégot avant bien sûr !), les cendriers de rue (proposant même parfois un système de vote humoristique ou ludique selon les localités) et enfin les cendriers de poche, disponibles chez les buralistes ou même parfois distribués gratuitement lors de festivals ou de manifestations publiques.

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