Pollution maritime : Affaire Guardians – Fin de la procédure judiciaire, Surfrider et France Nature Environnement se félicitent  

La Cour de Cassation a ordonné mercredi 12 novembre la déchéance du pourvoi de l’armateur du navire Guardians dans le cadre de l’affaire l’opposant à Surfrider Foundation Europe et France Nature Environnement.
La société armatrice n’ayant pas apporté d’arguments pour soutenir son pourvoi en cassation, les associations ressortent victorieuses de cette affaire de rejet illégal d’huiles végétales en mer.

Une pollution maritime détectée par satellite

Le 13 janvier 2021, le CROSS (Centre Régional Opération de Surveillance et de Sauvetage) JOBOURG reçoit une alerte du système CleanSeaNet de l’agence Européenne de sécurité maritime (EMSA) à la suite d’une détection par satellite d’une pollution de sillage par huile végétale, au large du Cap de la Hève à Sainte Adresse (76), dans les eaux territoriales françaises.


La détection satellite et l’analyse du système AIS (système de suivi d’itinéraire de navigation et des navires) permettent de rattacher la pollution au GUARDIANS (IMO n°9165451), seul navire sur zone au moment des faits ayant une trajectoire compatible avec la nappe polluante d’une longueur de 14,8km sur 0,94km de large.
Le GUARDIANS est un navire battant pavillon panaméen, de type chimiquier, spécialisé dans le transport d’huiles végétales. Le 13 janvier 2021, il a quitté le port de Rouen chargé de 4976,946 tonnes d’huile de colza en direction de Rotterdam.


Avant ce chargement, le bateau avait effectué un prélavage de ces cuves contenant des résidus d’Ester méthylique d’acide gras, issus du précédent voyage. Une partie de ces eaux usées (36m³) a été stockée dans les desks tanks avant d’être rejetée en mer, le 13 janvier 2021, en quittant le port de Rouen.


Ce rejet s’est effectué à une distance d’environ 10 miles nautiques (environ 18 km) des côtes alors qu’il n’est autorisé qu’à certaines conditions et notamment une distance de plus de 12 miles nautiques (plus de 22 km). Sur la base de ces éléments, le procureur du Havre engage des poursuites contre la capitaine et l’armateur du navire pour rejet illicite de substances polluantes.

Le capitaine et l’armateur reconnus coupables après 4 ans de procédure

Surfrider Foundation et France Nature Environnement se sont constituées partie civile dans cette affaire.
Lors du procès en 1ere instance, le tribunal judiciaire du Havre a relaxé le capitaine et l’armateur au motif que l’enquête effectuée par la gendarmerie maritime ne permettait pas de démontrer l’imputabilité de la pollution au navire.
Pourtant, il n’y avait pas d’autre navire qui transportait ce type de marchandise (huiles végétales) dans le secteur de l’incident. L’analyse des images satellite, et de la route des navires sur zone tend à démontrer quant à elle, que le GUARDIANS est bien responsable de cette pollution.


Lien vers le jugement de première instance


Surfrider et France Nature Environnement ont fait appel de cette décision, soutenant la fiabilité du système CleanSeanet.
Le jour de l’audience devant la Cour d’appel de Rouen, l’avocat général a demandé une expertise avant dire droit accordé par les juges. Cette expertise visait à verser au dossier des éléments manquants permettant de lever les doutes quant à l’imputabilité de la pollution au navire et contredire les arguments de la défense. Grâce à l’utilisation du modèle de prévision de dérive MOTHY, l’experte du CEDRE, missionnée par la Cour, a pu analyser la simulation d’un rejet continu sur la trajectoire du GUARDIANS et une simulation à rebours (ou “backtracking”) à partir de la nappe prise en cliché par le satellite.

Cela lui a permis de conclure, avec certitude, que le rejet peut être rattaché au navire incriminé.
Le 25 avril 2025, la Cour d’appel de Rouen reconnaît le capitaine et l’armateur du Guardians coupables de rejet illicite de substances polluantes en mer. Une amende de 80 000 euros a été prononcée, dont 60 000 euros à la charge de l’armateur, prélevés en priorité sur la caution versée. Les parties civiles France Nature Environnement (FNE) et Surfrider Foundation se voient accorder 10 000 euros au titre des dommages et intérêts.

Une déchéance de la procédure permet aux associations de gagner une affaire qui fera date dans les détections et répressions des pollutions maritimes

Suite à l’arrêt de la Cour d’Appel de Rouen, l’armateur du Guardians s’était pourvu en cassation pour faire contester cette décision. Cependant, la Haute Juridiction a constaté ce mercredi 12 novembre la déchéance de la procédure, les avocats de la société armatrice, n’ayant pas régularisé de mémoire ampliatif au soutien de leur pourvoi. Cette décision met donc un terme définitif à cette affaire.


Surfrider Foundation et France Nature Environnement se félicitent de cette décision de justice faisant date pour l’environnement. C’est la première fois en France qu’un capitaine et un armateur de navire sont reconnus coupables par la justice sur la base d’une détection satellite et de l’utilisation du système d’authentification automatique des navires (AIS). Jusqu’ici les principaux moyens de preuves ont toujours été : une observation en flagrant délit, depuis un avion ou un navire, d’un rejet illicite dans le sillage immédiat d’un navire ainsi que l’utilisation d’une preuve photographique. D’autres pays, comme l’Angleterre ou l’Espagne, avaient déjà fait condamner des capitaines et leurs armateurs suite à une détection par satellite.


Cette jurisprudence est donc une victoire pour le droit français de protection de l’environnement face à des capitaine et des compagnies peu scrupuleuses des règles environnementales. Les rejets illicites d’hydrocarbures et autres substances de nuit ou dans des zones en dehors de la surveillance par les aéronefs nationaux pourront donc être condamnés grâce à des systèmes satellitaires plus performants.


À propos de Surfrider Foundation Europe
L’ONG Surfrider Foundation est un collectif d’activistes positifs qui agit concrètement sur le terrain au quotidien pour transmettre aux générations futures un Océan préservé. Notre mission : porter haut et fort la voix de l’Océan ! Nos armes ? Sensibiliser et mobiliser les citoyens, enfants comme adultes (notamment grâce à 48 antennes bénévoles dans toute l’Europe), utiliser notre expertise scientifique pour porter des actions de lobbying et transformer les entreprises. Découvrez l’association sur https://surfrider.fr/ ou via cette vidéo

À propos de France Nature Environnement
France Nature Environnement est la fédération française des associations de protection de la nature et de l’environnement. Elle est la porte-parole d’un mouvement de 6 000 associations, présentes sur tout le territoire français, dans l’hexagone et les Outre-mer.


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