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Lettre à M. Oettinger, commissaire européen en charge de l’énergie

Surfrider Foundation Europe a co-signé une lettre avec Oceana et Seas at Risk à l’attention du Commissaire Européen en charge de l’énergie, Monsieur Günther Oettinger. Une proposition de loi européenne verra le jour en septembre, c’est dans ce contexte que la coalition d’ONG encourage l’UE à changer de voie en ce qui concerne la régulation des activités offshore.

Traduction française 

Monsieur Günther Oettinger

Commissaire européen en charge de l’énergie

200, Rue de la Loi

B – 1049 Bruxelles, Belgique

Bruxelles, le 01 septembre 2011

Objet : Concernant les forages offshore et la nécessité d’une action forte de l’UE

Monsieur le Commissaire Oettinger,

Suite à des observations individuelles fournies à la Commission européenne en réponse à la consultation publique sur l’amélioration de la sécurité en mer proposées par les groupes co-signataires de cette lettre, en tant que coalition d’ONG, nous vous écrivons afin de plaider pour une approche vraiment responsable au sujet du forage offshore en Europe et ce en anticipation à votre proposition ce Septembre.

Des leçons doivent être apprises

Ce qui ressort clairement des enquêtes récentes sur les activités de forage à la fois en Europe et aux Etats-Unis, c’est que les autorités nationales ne parviennent pas à réglementer adéquatement les opérateurs de forage offshore parce que les revendications de sécurité formulées par l’industrie sont trop prétentieuses, de plus les opérateurs ne parviennent pas à prendre des mesures de sécurité appropriées. Le règlement au niveau de l’UE fait gravement défaut et de nombreuses lacunes existent dans le processus d’autorisation, qui manque souvent de cohérence quand il s’agit de l’évaluation technique ou environnementale des études d’impact.

Si les rapports sur les pratiques de forage n’ont pas réussi à éclaircir ce point, il est également choquant qu’une administration nationale ait une telle approche à propos des plates-formes pétrolières en Mer du Nord, opérant dans les eaux britanniques, qui ont souffert de fuites majeures ou d’important écoulement à une fréquence de presque un par semaine en 2009 et 2010. Un autre fait rapporté par le Health and Safety Executive fait état que plus de 96% des installations en mer du Nord exigent des améliorations suite aux inspections qui ont eu lieu au cours des trois dernières années, avec une installation sur cinq montrant des « défauts majeurs ». Ces résultats sont peut-être surprenants quand on voit que plusieurs parties prenantes ont donné de telles assurances au Royaume-Uni quant à son « approche de la sécurité ».

Les régimes nationaux de réglementation actuels à la fois en Europe et dans le monde ont échoué et il est opportun de rappeler la fuite de Shell en cours dans la mer du Nord et le déversement de pétrole dans une installation en mer de Bohai en Chine. Une nouvelle voie est à prendre d’urgence et il y a deux principales mesures qui doivent être prises au niveau européen.

La nécessité d’un grand régulateur européen

Le pétrole répandu à partir les installations offshore ne respect pas les frontières nationales, ni les écosystèmes marins fragiles et ne porte aucun respect envers les nombreuses ressources marines dont les citoyens dépendent. En élevant les normes européennes communes sur les activités de forage en mer, un organisme chargé de veiller sur ces normes est sans aucun doute dans l’intérêt de tous les États membres, et pas seulement ceux qui ont compétence sur certains bassins maritimes. Il est donc crucial qu’une réponse appropriée à travers l’Europe soit prise dans le but d’élever le niveau de sécurité et de s’assurer que les régulateurs nationaux et les opérateurs se conforment à ces normes.

Nous croyons qu’un régulateur à l’échelle européenne apporterait une valeur ajoutée et de nombreux avantages aux régulateurs nationaux, aux opérateurs et aux contribuables de l’UE. Non seulement une telle approche permettrait de fournir un point de vue indépendant pour vérifier que la législation est correctement mise en oeuvre, mais elle permettrait aussi que les sécurités vantées par l’industrie soient réelles et que le rapport  sécurité / dégradation de l’environnement devienne plus transparent. Avec un grand régulateur européen, nous pourrons s’assurer que les processus d’autorisation en mer, les normes de sécurité et que  de meilleures pratiques environnementales soient homogénéisées et intégrées dans les régions de l’UE et permettre ainsi de résoudre le déséquilibre actuel. Cette réforme est particulièrement importante, surtout concernant les bassins les moins bien préparés et où l’exploration offshore est désormais en plein développement (c.-Méditerranée, Mer Noire).

La supervision européenne ne devrait pas être considéré comme une ponction sur les ressources nationales, mais comme un complément à ces ressources, car elle serait finalement un moyen de réduire les risques potentiels de déversements de pétrole et les coûts associés pour les citoyens européens (nettoyage, réparation et demandes d’indemnisation). C’est un coût nécessaire pour l’Europe, il est primordial de mettre l’accent sur la prévention pour développer une solide culture de sécurité dans l’UE et dans les activités offshore. Bien sûr, une telle expansion des services de l’UE dans ce contexte devrait être à juste titre sujet à un investissement qui pourrait être satisfait par les opérateurs de forage pétrolier (en contribuant financièrement à un tel service).

Notre groupe d’ONG vous invite à enquêter de part votre proposition de la possibilité pour l’EMSA (European Maritime Safety Agency) de se qualifier pour ce rôle de supervision de l’UE, en s’appuyant sur la longue expérience de l’agence et des outils pertinents développés pour faire face à la pollution des navires et à la sécurité.

La nécessité d’une couverture de responsabilité globale

Des mesures doivent être prises en ce qui consacre le principe « pollueur-payeur », il faut aussi s’assurer que les contribuables ne soient pas rendues financièrement responsables des dommages environnementaux industriels. Il est important de réaliser ici que tous les opérateurs de forage de pétrole sont aussi bien dotée financièrement les unes que les autres, d’autre part tous les opérateurs ont des marques grand public qui nécessitent une protection immédiate en cas de catastrophe. Nous lançons un appel à vos services de la Commission afin de s’assurer que des régimes de responsabilité strictes se mettent en place pour les dommages environnementaux. Nous vous invitons également à proposer que tous les opérateurs de forage offshore, individuellement ou collectivement, dans toutes les eaux européennes et au-delà soient entièrement responsables de toutes compensations et de tous nettoyages suite à un  déversement de pétrole. Si une telle capacité financière ne peut être assuré les groupes pétroliers ne devraient pas être autorisés à entreprendre des opérations de forage.

Nous tenons à vous rappeler que le problème ne se porte pas sur la question de «beaucoup d’hydrocarbures » ou de « peu d’hydrocarbures », mais sur la capacité de l’industrie à intégrer la comptabilité des dommages environnementaux qui pourraient résulter d’une activité, en soi, risquée ainsi que le rôle de la couverture de responsabilité dans la prévention des négligences. Des leçons doivent être tirées de l’incident de Deepwater Horizon, où il est évident qu’un plafond de responsabilité de 75 millions de dollars américains n’était pas un montant approprié pour inciter l’investissement adéquat nécessaire pour prévenir un déversement de pétrole (en considérant que le coût complet de l’incident est susceptible d’atteindre 50 milliards de dollars). Prédire l’effet d’un important déversement de pétrole est presque impossible à faire de ce fait, la délimitation de la responsabilité financière appropriée est également difficile, voire impossible. Nous vous encourageons à assurer que les opérateurs soient entièrement responsables de tout dommage à l’environnement marin et de toute nuisances sur le bien-être humain. Il est également crucial de renforcer les mesures dissuasives par des amendes plus importantes ou par le retrait des licences et, le cas échéant, porter des affaires pénales à l’encontre des opérateurs et des particuliers, si des actes répréhensibles ont été démontrés. Seules ces mesures de sécurité assureront des règles de responsabilité claires et complètes nécessaires pour ramener un sentiment de responsabilité requis par les opérateurs.

Donner la priorité à l’environnement et la sécurité humaine

Les forages pétroliers en mer sont des activités risquées et ces risques sont en croissance, en particulier concernant leur évolution vers des environnements toujours plus profonds, plus dangereux et plus fragile, comme la région arctique – où les normes existantes de l’industrie pétrolière sont largement inadaptées et où les plans d’urgence mis en place ainsi que les infrastructures de sauvetage sont pratiquement inexistants. Mettre en place une réglementation faible permettant seulement la poursuite des forages pétroliers au motif qu’il serait trop financièrement prohibitive serait un désastre.

Parallèlement à d’autres demandes clés que nous, les ONG environnementales ont proposé dans nos réponses individuelles à la récente consultation, nous vous encourageons à respecter strictement le principe de précaution et de prioriser la protection de l’environnement marin et la sécurité des travailleurs sur les installations offshore dans votre proposition de septembre.

Cordialement,

Xavier Pastor, directeur exécutif d’Oceana Europe

Monika Verbeek, directeur exécutif de Seas at Risk

Copies à :

  • M. Janez Poto?nik (commissaire à l’environnement),
  • Connie Hedegaard (Commissaire à l’action pour le climat),
  • Štefan Füle (Commissaire à l’élargissement et à la politique européenne de voisinage),
  • László Andor (Commissaire à l’Emploi, des affaires sociales et de intégration)