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Stratégie de l’UE pour la biodiversité à l’horizon 2030 : une occasion manquée pour l’Océan ?

Dans le cadre du Pacte vert pour l’Europe, Surfrider Europe salue la nouvelle stratégie pour la biodiversité publiée le 20 mai par la Commission européenne et son ambition de protéger et restaurer la nature en Europe, ainsi que de générer des changements significatifs pour mettre fin à la perte de biodiversité. Cependant, l’organisation est surprise du peu d’attention accordée à l’océan : à peine la moitié des 17 annonces clés concernent la biodiversité marine. 

Pas assez d’engagements pour la protection de l’Océan 

Dans cette nouvelle stratégie pour la biodiversité, la Commission européenne (CE) propose plusieurs mesures importantes soutenues par Surfrider et rappelle que seuls 11% des mers européennes sont protégées sur au moins 30% nécessaires. Or, la Stratégie proposée accorde beaucoup moins d’attention aux sujets océaniques qu’à ceux de préservation terrestre, tandis que plus d’efforts sont nécessaires pour atteindre le bon état écologique de l’océan. Rappelons que la biodiversité marine a été réduite de moitié depuis les années 1970 ; d’ici 2100, plus de la moitié des espèces marines seront au bord de l’extinction. 

Surfrider Europe salue la proposition de la Commission d’accorder le statut de “protection stricte” à 10% des zones protégées dans l’UE. En conformité avec la classification de l’UICN, les activités comme l’exploration et l’exploitation gazières et pétrolières devraient être interdites dans ces zones – mais Surfrider appelle l’UE à les proscrire dans toutes les aires marines protégées, compte tenu de leur impact extrêmement nocif pour la biodiversité marine. Interdire les forages en mer contribuera en partie à l’objectif de décarbonisation de l’énergie, mis en avant par la CE, et à la lutte contre le changement climatique, l’une des principales causes de la perte de biodiversité. Nous espérons que l’interdiction des forages pourrait ensuite être étendue à toutes les eaux européennes.

En outre, les écosystèmes marins sont très impactés par la pollution qui doit être réduite urgemment, et par d’autres activités humaines nocives. Nous attendons des mesures législatives concrètes dans le cadre des stratégies à venir “zéro pollution” et celle sur les substances chimiques, pour lutter contre la pollution chimique et les déchets aquatiques, notamment plastiques et microplastiques (ajoutés intentionnellement dans nos produits quotidiens et industriels, ainsi que provoqués par l’usure des pneus de voiture, les granulés de plastiques industriels et le lavage de nos vêtements). Les impacts du tourisme et du développement côtier devraient être abordés dans la nouvelle stratégie européenne sur l’adaptation au changement climatique, ainsi qu’en transformant la notion proposée de “villes vertes” en “villes respectueuses de l’océan”. Les problèmes comme le bruit sous-marin et les espèces invasives doivent être résolus en imposant des pratiques durables à l’industrie maritime (par exemple via la promotion du label Green marine et une réglementation stricte), tout comme des mesures pour prévenir la perte de containers – une autre pollution majeure du secteur maritime.

On salue l’accent mis par la Commission sur le rôle de la science et éducation dans la conservation de la biodiversité. Il est crucial que les connaissances sur notre poumon bleu soient au cœur des programmes proposés pour l’éducation, en accord avec les objectifs de l’alphabétisation océanique de l’UNESCO et la Décennie de l’ONU pour les sciences océaniques. 

D’autres outils au service de la protection de biodiversité 

Surfrider Europe appuie l’intention de la Commission européenne d’assumer le leadership international pour protéger et restaurer la biodiversité mondiale, en négociant des ambitieux objectifs de long terme similaires à ceux pour le changement climatique. Nous sommes convaincus qu’il est également primordial d’assurer une mise en œuvre effective des objectifs déjà convenus (ex. l’élimination de subventions nocives avant 2020 prévue par les Objectifs d’Aichi dans le cadre de la Convention sur la diversité biologique). Nous soutenons également l’ambition de la CE d’utiliser les accords commerciaux pour sauvegarder la biodiversité dans d’autres parties du monde. 

La responsabilité du secteur privé dans la perte de biodiversité est magistrale, et nous sommes ravis de voir l’adhésion de la Commission au principe de pollueur-payeur et sa proposition de déplacer le poids fiscal du travail vers la pollution. Cependant, Surfrider Europe est convaincu que les principes de la Responsabilité sociétale des entreprises doivent être reformés afin d’encourager les acteurs privés à transformer leurs modèles économiques et à réduire la perte de biodiversité en garantissant le respect d’un niveau stable de protection environnementale. Il faut garantir que l’investissement dans le capital naturel, encouragé par la Commission européenne, est utilisé pour la préservation de la nature et non pas pour la poursuite de sa surexploitation.

En outre, nous sommes surpris par l’absence de mention des sports dans la stratégie proposée. Générant plus de 2% du PIB européen et employant 5,67 millions de personnes dont l’activité a un impact direct, et le plus souvent négatif, sur l’environnement, “l’industrie de sport a une responsabilité – et un intérêt – de garantir que son fonctionnement est durable1”, selon l’UICN. De ce fait, Surfrider Europe appelle la Commission à proposer des mesures pour réduire l’impact des activités sportives sur la biodiversité et l’environnement. 

La stratégie pour la biodiversité est accompagnée de la publication de la stratégie “De la ferme à la table”. Surfrider salue la proposition de diminuer l’utilisation de pesticides et antibiotiques de 50% ce qui profiterait à la santé de l’océan. En revanche, plus d’ambition est nécessaire pour parfaire l’économie circulaire et réduire en priorité les emballages plastiques à la source. Globalement, il est indispensable de proposer des objectifs concrets allant au-delà d’engagements volontaires du secteur avec une mise en œuvre rigoureuse. 

Il est urgent que l’impact cumulatif des pressions exercées par les activités humaines soit réduit et maintenu à des niveaux compatibles avec des écosystèmes marins en bonne santé. Préserver et restaurer la biodiversité de notre planète sera uniquement possible avec l’implication de tous les acteurs concernés et avec l’océan au cœur de nos engagements.